mardi 27 octobre 2015

La maison de Jevrem Grujić

Dans le centre ville, rue Svetogorska, se trouve un petit musée privé qui plonge ses visiteurs dans le Belgrade mondain d'autrefois: la Maison de Jevrem Grujić, diplomate et homme politique, ministre dans le gouvernement du Royaume de Serbie. 

La Maison de Jevrem Grujić et le Théâtre Atelje 212
Je suis certaine que beaucoup de Belgradois, tout comme moi jusqu'à il y a qelques jours, pensent que cette belle demeure est partie intégrante du Théâtre Atelje 212 qui est construit dans son prolongement. Ce n'est pas le cas. La construction de ce bel immeuble fut achevée en 1896 et cette demeure est le premier immeuble en Serbie qui reçut le statut de monument culturel en 1961.

Cette demeure n'est pas une demeure comme les autres. Elle est liée à une période très importante de l'Histoire de la Serbie: celle de sa transformation d'une société ottomane en une société européenne moderne. Elle représente la Serbie bourgeoise à l'aube du 20ème siècle, celle des premières générations éduquées dans les universités européennes et qui, les études achevées, revinrent en Serbie pour servir leur Roi, leur peuple et créer un pays moderne.

Jevrem Grujić

Mais commençons par le commencement, bien avant la construction de cette belle maison. 

Le Prince Miloš, premier souverain de la Serbie autonome sous l'Empire Ottoman était un grand amateur de femmes. Ses maîtresses furent nombreuses et certaines d'entre elles sont entrées dans l'Histoire, comme Petrija, tuée par la Princesse Ljubica, épouse du Prince Miloš, ou encore, plus importante pour notre sujet, Jelenka, dont la beauté envoûta le Prince, si bien qu'elle ne fut pas uniquement sa maîtresse, mais également son conseiller. Son influence était si grande qu'un seul mot de sa part au Prince pouvait vous faire monter en grade, ou vous faire perdre tout et finir en prison - ou finir tout court. Si la Princesse Ljubica était appelée la Grande Dame par le peuple, Jelenka était appelée la Petite Dame.

La belle Jelenka
Après de nombreuses années passées côte à côte, après la mort du fils né de leur liaison, et peut-être même après un accord fait avec son épouse légitime la Princesse Ljubica, le Prince Miloš marie sa maîtresse Jelenka à Teodor Herbez, homme politique, ministre des finances et membre du Conseil d'Etat. 

Le Prince Miloš fut plus que généreux et offrit en tant que dotte à la mariée un grand terrain dans ce qui était alors la périphérie de Belgrade, et sur une partie duquel se trouve aujourd'hui la Maison Grujić. Jelenka et Teodor n'eurent pas de descendants et adoptèrent la nièce de Jelenka, nommée Jelena. C'est Jelena qui, à la mort de ses parents adoptifs, hérita de tous leurs biens.

Au bal de la Cour, Jevrem fait la connaissance de la jeune Jelena et l'épouse peu après. Elle a 16 ans. Sa robe de mariée est exposée dans l'un des salons et on peut remarquer que la robe est de style européen. Et c'est ainsi que commence l'histoire de cette merveilleuse demeure. Jevrem Grujić entreprit sa construction dont il ne vit malheureusement pas la fin. En effet, la construction s'acheva environ un an après son décès, en 1896.

Portrait de Jelena Grujić et sa robe de mariée. Dans ce portrait, elle est représentée dans la robe qu'elle porta lors du jubilé d'or de la Reine Victoria
Portrait de Jevrem Grujić (à gauche) et son costume
La famille Jevrem cotôya les membres des familles royales et souvent la Reine Natalija Obrenović venait prendre le thé sans protocole, en amie. Dans l'un des salons se trouve également une photographie de la Reine Maria Karađorđević avec sa dédicace, car la fille de Jelena et Jevrem, Mirka, fut la première dame dans l'escorte de la Reine.

Portrait de la Reine Natalija dans l'un des salons. Sour le portrait, l'un des objets les plus précieux du musée, un service pour liqueur en cristal, cadeau du Roi Milan et de la Reine Natalija
Entrée dans le salon où est exposée la photo dédicacée de la Reine Maria Karađorđević
Jelena et Jevrem eurent dix enfants. Mais seule l'une de leurs filles eut des descendants, dont font partie les propriétaires actuels de la demeure. Au fil de votre visite se succèdent les portraits et photographies des membres de la famille, comme celles de Slavko Grujić, fils de Jelena et Jevrem, diplômé de la Sorbonne à Paris, ambassadeur de la Serbie à Londres et de son épouse américaine, Mable, surnommée la Jeanne d'Arc Serbe.



Les armes exposées ont pour la plupart servi lors de grands événements historiques de la Serbie, comme par exemple lors de la première insurgion serbe contre l'occupation ottomane.


La maison ayant été pillée durant la Première Guerre Mondiale, la famille emmurra tous ses objets précieux dans la cave lorsque la Seconde Guerre Mondiale éclata. Tant mieux pour toutes les générations qui peuvent admirer tous ces trésors de la Serbie d'antan.

 
Tout ceci n'est que pour vous donner un avant-goût de tout ce que vous pouvez voir dans cette demeure splendide. Tous les détails, histoires, anecdotes que révèlent les objets exposés attendent que vous les découvriez, si vous passez par Belgrade et si vous désirez remonter le temps, le temps d'une visite dans la Maison de Jevrem Grujić.

vendredi 16 octobre 2015

La Tour Nebojša

Tout près du confluent de la Save et du Danube, au pied de la forteresse Kalemegdan, se trouve une petite tour qui se dresse, solitaire et fière, et témoigne de grands événements du passé de la capitale: la Tour Nebojša, construite vers 1460 par les Hongrois et qui servit durant longtemps à veiller sur le port du Danube et à repousser les attaques de l'armée Ottomane.
 
La Tour Nebojša
Nebojša est un nom masculin serbe et bien souvent, même les serbes qui ne connaissent pas vraiment leur Histoire, pensent que la tour porte le nom d'un certain personnage du nom de Nebojša. Mais ce n'est pas le cas. La tour porte un nom plus dramatique et symbolique: Nebojša, du verbe ''Ne pas avoir peur'' (Ne bojiti se).

Ainsi, la Tour est courageuse et n'est pas facilement intimidable, la Tour n'a pas peur. Comme le raconte la légende, lors de la conquête de Belgrade par les Ottomans en 1521, la Tour qui faisait jusqu'alors partie de la forteresse s'éleva dans l'air et s'envola pour se déposer au pied de la forteresse, à sa place actuelle, si bien qu'elle ne fut pas conquise par les ottomans lors de la prise de la forteresse.

Bien sûr, les faits réels disent autrement, car la vieille tour fut détruite lors de cette bataille et ce n'est qu'une fois que la résistance de ses canons fut anéantie que l'armée ottomane réussit à prendre la forteresse de Belgrade. La Tour fut détruite plusieurs fois et plusieurs fois reconstruite dans le passé.



Durant l'occupation ottomane, elle perdit petit à petit son rôle de gardienne du port pour remplir à la fin une fonction bien plus lugubre, celle d'un donjon infâme où de nombreuses personnes trouvèrent la mort.

Parmi elles, un héro grec de la lutte contre l'occupation Ottomane qui n'a pas été oublié par le peuple serbe: Rigas Fereios. En effet, tout près de la forteresse dans le quartier de Dorćol, un monument lui est dédié, dans la rue qui porte également son nom. L'une de ses célèbres citations: ''Mieux vaut vivre un jour en tant qu'homme libre, que de vivre quarante ans en tant qu'esclave''.

Il fut exécuté dans la tour le 24 Juin 1798, et son corps fut jeté dans le Danube. Ses derniers mots furent: ''J'ai semé de riches graines, le jour est proche où mon peuple récoltera les fruite fameux.''

Le monument dédié à Rigas Fereios
Durant la seconde guerre mondiale, la rive où se trouve la Tour fut le lieu de bien tristes événements. En effet, les corps des victimes du camp de concentration de Jasenovac jetées dans la Save firent surface à cet endroit et les pêcheurs Belgradois les enterrèrent autour de la tour, dans une fosse commune.

La rive au pied de la Tour Nebojša
La Tour fut restaurée il y a quelques années et abrite un petit musée. La rive est aujourd'hui un lieu de promenade et la piste cyclable permet aux amateurs de balades à vélo de jouir de l'atmosphère relaxante du fleuve.

La Tour est toujours là, et garde la forteresse. 
 

samedi 5 septembre 2015

Le quartier historique Kosančićev Venac

Dans le centre ville, se trouve un petit quartier historique qui se nomme d'après l'une de ses rues: Kosančićev Venac, la couronne de Kosančić ou encore le cercle de Kosančić.

La rue Kosančićev Venac
Ce petit quartier est formé de quelques rues dans lesquelles les passants ont l'impression que le temps s'est tout simplement arrêté. Bien que dans le centre ville, il est hors de portée des sirènes, les klaxons et des explosions des pots d'échappements. Les rues sont pavées comme au début du 19èle siècle et, en hiver, les habitants de ce quartier ont bien du mal à démarrer leur voitures sur les pavés lisses et glissants s'ils n'ont pas de bons pneus.

Les vieux pavés
Ce quartier donne d'une part sur la forteresse Kalemegdan, l'église Saborna Crkva, le Palais de la Princesse Ljubica et la rue du Roi Pierre 1er avec la célèbre kafana ''Le Point d'Interrogation'' qui représentent les repères historiques du développement du Belgrade moderne libéré de la domination ottomane au début du 19ème siècle. Mais je vous ai parlé de tout çà.

Au coin de la rue Kosančićev Venac, le centre historique du développement du Belgrade libre
De l'autre côté, ce quartier offre une vue magnifique sur la Save et on peut descendre vers le pont qui rejoint le vieux et le nouveau Belgrade.

La rue Kosančićev Venac porte le nom du héro serbe de la bataille du Kosovo en 1389: Ivan Kosančić. Sur la façade de la maison la plus célèbre et la plus photographiée de cette rue et qui date de la fin du 19ème siècle, se trouvait juqu'à il y a à peu près 4 ou 5 ans le buste d'Ivan Kosančić. Malheureusement, la façade ayant détérioré au fil des années, le buste menaçait de tomber et les habitants de cette petite rue pittoresque ont décidé de sauver leur héro, si bien que le buste est à présent gardé dans la cave de cette maison et attend des jours meilleurs.


La niche sur la façade est aujourd'hui vide


Le buste du héro Ivan Kosančić 
L'un des repères historiques de ce quartier est la maison de Mihajlo Petrović, portant le surnom de ''Alas'', le ''Pêcheur'', tant il était passionné par ce passe-temps. Mihajlo Petrović est un célèbre personnage de l'Histoire de Belgrade, mathématicien reconnu, professeur de l'Université de Belgrade et membre de l'Académie Royale Serbe. A sa mort, en 1943, son cercueil fut transporté depuis sa maison jusqu'au cimetière par ses amis, les pêcheurs du Danube et de la Save, qui voulurent montrer leur respect à ce grand homme qui aimait les plaisirs simples. La façade de la maison porte une plaque commémorative et est décorée magnifiquement.

La plaque commémorative sur la façade de la maison de Mihajlo Petrović Alas

 Maison de Mihajlo Petrović Alas

Maison de Mihajlo Petrović Alas
Sur le plateau devant la maison de Mihajlo Petrović Alas, les peintres belgradois installaient autrefois leurs chevalets et peignaient les beaux couchers de soleil sur la Save.

Vue sur la Save depuis le plateau devant la maison de Mihajlo Petrović Alas
Ce quartier a vu l'ouverture de la première pharmacie à Belgrade. Il a également accueilli la Bibliothèque Nationale de 1920 à 1941. L'institution de la Bibliothèque Nationale fut créée par le Prince Miloš en 1832. Le Prince Miloš donna alors l'ordre à tous les éditeurs de faire un don de quelques livres à la Bibliothèqe Nationale.

En 1920, la Bibliothèque Nationale déménagea et des milliers de livres et de manuscrits prirent leur place sur les étagères de la bibliothèque aux numéros 12 à 16 de la rue Kosančićev Venac. Petite diversion, cet immeuble abritait dans les années 1880 les locaux de l'ambassade de France.

L'imposant immeuble de la Bibliothèque Nationale n'est aujourd'hui qu'un souvenir sur les vieilles photos jaunies. Le 6 Avril 1941, il fut complètement détruit dans le bombardement de Belgrade par l'aviation allemande. 300.000 livres furent perdus à tout jamais, dont 1500 manuscrits datant du Moyen-Age. La grande majorité des manuscrits du Moyen-Age et ceux datant de l'occupation de l'Empire Ottoman n'avaient même pas été étudiés.

L'immeuble de la Bibliothèque Nationale
Aujourd'hui, le terrain où se trouvait la Bibliothèque Nationale est encore une grande fosse qui n'a pas été comblée depuis plus de 70 ans, témoin de la fureur de la guerre et cicatrice dans la mémoire des Belgradois.

L'emplacement de la Bibliothèque Nationale détruite le 6 Avril 1941
Au numéro 32 de cette rue célèbre se trouve également les locaux de la première institution musicale de Belgrade, la ''Première institution belgradoise de chant'', fondée en 1853.

La rue Kosančićev Venac abrita également le Foyer artistique où se rencontrait et créait le Belgrade artistique. Cet immeuble à gardé sa tradition depuis et il est aujourd'hui une galerie de tableaux.

L'immeuble du Foyer artistique

Attention: illusion optique artistique
Tout au long de notre promenade, on peut admirer les beaux immeubles qui reflètent la riche architecture du vieux Belgrade d'antan.

Porte d'un immeuble datant de 1928










L'atmosphère de ce quartier est sereine et les petits cafés invitent les passants et touristes à prendre un petit verre ou un café et surtout, surtout, à prendre leur temps...

Petite terrasse d'un café

Petite terrasse d'un café

lundi 24 août 2015

Et si vous veniez faire un tour à Belgrade?

Voilà presqu'un an et demi, je débutais ce blog et commençais avec enthousiasme ma ''mission''. Tout d'abord, faire connaître Belgrade à ceux qui ne le connaissent pas ou en ont (encore) une idée déformée. Puis, sachant que la communauté serbe est importante en France et surtout à Paris, leur faire plaisir en parlant de la Ville Blanche et, qui sait, peut-être leur réchauffer le coeur au fil des lectures, car rien n'est plus émouvant que de se rappeler son pays natal bien-aimé.

Et puis c'est moi, au cours de mes excursions, visites, promenades et recherches, qui suis tombée amoureuse de la vieille Singidunum. En effet, quelle Histoire, quel héritage!

Jour après jour, j'ai découvert une architecture sublime. Même si les immeubles sont assez détériorés, les façades témoignent de la splendeur d'antan. Les rues et places où je suis passée des centaines de fois prennent soudaiement une autre dimension lorsqu'elles sont liées à un événement historique dont je ne connaissais auparavant pas les faits.

Les anecdotes du vieux Belgrade que j'aime raconter dans mes billets chaque fois que s'en présente l'occasion n'ont fait qu'amplifier le sentiment que Belgrade est réellement une ville qui a toujours eu de l'âme et qui, malgré tous ses déboires, a su la préserver.

Alors, comme le dit mon blog: Visitez Belgrade! Et si vous vous décidez à le faire, sachez que j'ai allié ma tendresse pour la capitale serbe à une nouvelle vocation que je me suis découverte au cours des heures passées à l'écriture de mon blog: accueillir les visiteurs à la hauteur de l'hospitalité serbe, et ceci dans un petit établissement charmant: l' Authentic Belgrade Centre Hostel.

Situé en plein coeur de Belgrade, à quelques pas de la Place de la République et du Théâtre National, il est le lieu parfait pour ressentir la capitale serbe. Je vous invite donc à découvrir mon site internet www.authenticbelgradecentrehostel.rs. Aux lecteurs de mon blog, pour toute demande et réservation par un message par l'intermédiaire de ce dernier, j'offre des prix spéciaux en cette période de promotion.

Et si vous veniez faire un tour à Belgrade? Nous ouvrons le 1er Septembre, alors, n'hésitez pas à nous contacter et j'espère, à bientôt, pour une expérience authentique!

Immeuble datant de 1922 où se trouve Authentic Belgrade Centre Hostel

samedi 22 août 2015

La visite des palais royaux de Dedinje

L'association touristique de Belgrade organise la visite du complêxe royal de Dedinje que forment le Palais Royal (Kraljev Dvor) et le Palais Blanc (Beli Dvor).

Le complêxe royal n'est pas un musée. Malheureusement, il n'est pas permis de prendre des photos à l'intérieur des palais car c'est aujourd'hui la demeure officielle de l'Héritier au trône de la Serbie Aleksandar II Karađorđević. Certains visiteurs ont parfois la chance d'échanger quelques mots avec le Prince et avec son épouse la Princesse Katarina car, comme nous l'a raconté notre guide, ils n'hésitent pas à joindre les goupes de visiteurs chaque fois que leur emploi du temps le leur permet.

Le Prince Aleksandar II et la Princesse Katarina sont très actifs au sein de leur organisation humanitaire. Ils aident les hôpitaux et les démunis, mais également les jeunes talents qui feront demain la fierté de la Serbie. De nombreuses actions humanitaires ont lieu dans le palais et ils sont également très engagés dans la promotion d'une meilleure image de la Serbie dans le monde. Depuis son installation dans le complêxe royal de Dedinje, le Prince Aleksandar II a déjà investi quelques 6 millions de dollars à la rénovation des bâtiments et à l'entretien du terrain attenant, car depuis la mort du Maréchal Tito, tout avait été laissé dans un état pitoyable.

De par sa grand-mère, la Reine Marie, le Prince Aleksandar II est le 26ème prétendant en ligne au trône anglais. Né en éxil en 1944, il fut baptisé dans la cathédrale de Westminster et sa marraine fut la Reine Elisabeth elle-même.

Belgrade a subi de grandes destructions durant la Seconde Guerre Mondiale mais le complêxe royal, éloigné du centre ville, est resté intact et offre à ses visiteurs un atmosphère authentique. Tout ce qui se trouve sur cette propriété fut construit avant guerre, à part un centre recréatif construit pour les besoins du Maréchal Tito, et une statue qui se trouve au détour d'une allée, dans le bois, et qui représente un soldat de l'Armée Rouge, libératrice de Belgrade en 1944.

Statue d'un soldat de l'Armée Rouge
Le complêxe Dedinje a eu plusieurs locataires: tout d'abord, le Roi Alesandar I (grand-père d'Aleksandar II), puis le Prince Pavle, après l'attentat de Marseille dans lequel le Roi Aleksandar I trouva la mort. Durant la seconde guerre mondiale, c'est le chef de la commande allemande qui s'y installa, puis, après la guerre, Tito. En 2001, l'Héritier au trône de la Serbie Aleksandar II Karađorđević s'y installe officiellement mais le propriétaire des palais et des ses terres attenantes est encore aujourd'hui l'Etat de la Serbie.

Mais commençons par le commencement:

En 1921, Aleksandar I, le régent et futur souverain du Royaume des Serbes, Croates et Slovènes est encore célibataire. Pour un prétendant au trône si prestigieux, il convenait de trouver une épouse à la hauteur. 

C'est le premier ministre Nikola Pašić (dont la place où se trouve le Parlement porte le nom et dont je vous ai montré la demeure dans la Rue de France) qui entrepris de trouver pour son prince une princesse idéale. Il part pour la Roumanie, où il sait que la Princesse Marie de Roumanie, arrière petite-fille de la Reine Victoria serait certainement la candidate parfaite. La Princesse accèpte de faire la rencontre du Prince Aleksandar. Le mariage est convenu, mais ne sera célébré qu'un an plus tard pour cause de décès du Roi Pierre 1er.


Le couple royal s'installe tout d'abord dans le centre ville, dans le Nouveau Palais dont je vous ai également parlé et qui est aujourd'hui le siège du Président de la Serbie. Le jeune couple est littéralement sous la loupe des Belgradois. La foule s'ammasse sous les fenêtres du palais et on attend avec impatience un héritier au trône. Bien vite, le roi et la reine trouvent la situation insupportable et décident de bâtir une résidence plus à l'abri des curieux, où ils pourront passer leurs journées en toute tranquillité.

Le portail à l'entrée de la propriété
Le Roi rachète alors à l'Eglise Serbe Orthodoxe un terrain vierge. Cette propriété s'étend sur 130 hectares, dont 90 hectares forment les bois qui entourent les édifices. Le Roi entreprend la construction de sa nouvelle résidence dont les travaux durèrent 17 ans et dont, malheureusement, il ne vit pas la fin.

Le premier édifice que l'on peut voir en entrant sur cette propriété est le bâtiment du service du protocole du Roi.

Le bâtiement du service du Protocole du Roi
De cet endroit, deux allées mènent aux deux édifices prinpipaux. Nous nous dirigeons d'abord sur l'allée gauche, vers le Palais Blanc (Beli Dvor). Le Palais blanc devait servir de résidence aux trois fils du Roi Aleksandar.

Nous pouvons voir d'abord la caserne de la brigade des gardistes qui est aujourd'hui vacante, le Prince Aleksandar II n'étant pas gardé par l'armée.

Le bâtiement de la brigade des gardistes
L'allée des châtaigniers rouges nous mène tout droit au Palais Blanc.

L'allée des chataîgniers
Mais en route nous nous arrêtons pour une petite anecdote. Sous l'ombre des arbres se trouve une pierre tombale, celle du tombeau de Davorinka Paunović, secrétaire, maîtresse et grand amour du Maréchal Tito. Elle mourrut de la tuberculose en 1946, avant que le Maréchal ne l'épouse, mais il ne l'oublia toutefois jamais et elle repose encore aujourd'hui dans le parc du palais.

La pierre tombale de Davorinka Paunović, la maîtresse du Maréchal Tito
La construction du Palais Blanc fut entamée en 1934. Deux mois plus tard, le Roi Aleksandar I touvait la mort à Marseille, victime d'un attentat. C'est le Prince Pavle qui finira la construction du Palais.

Le Palais blanc

Le Palais Blanc

Le Palais Blanc
Le Palais blanc a une superficie de 4000 m2 et est construit dans un style à l'anglaise. Les salles de réception sont au rez-de-chaussée et 5 appartements se trouvent au premier étage. Seuls les salons sont accessibles aux visiteurs. D'un salon à l'autre, nous avons pu admirer les oeuvres d'art et les objets personnels de la famille royale, comme par exemple un service en porcelaine qui faisait partie de la dotte de la la Princesse Marie de Roumanie. Les meubles en style Louis XVI ont été soigneusement rénovés.

Nous avons pu également voir le fauteuil du Maréchal Tito dans lequel il prenait place lors de rencontres avec des hommes d'état ou encore avec des grands acteurs holywoodiens, tant il était passinonné de cinéma, et surtout de westerns.

Slobodan Milošević s'installa dans le même fauteuil mais c'est un miroir qui lui est davantage lié: celui devant lequel il donna sa démission dans un communiqué télévisé émis dans le monde entier.

Dans la bibliothèque du Prince Pavle se trouvent des livres en 8 langues car le Prince était plus que polyglotte. Le livre le plus précieux de cette collection est bien entendu sous clé. Il s'agit d'une bible du Moyen-Age en or.

Notre visite du Palais Blanc est terminée et nous nous dirigeons vers le Palais Royal. En chemin se dresse une petit maison à l'allure campagnarde: La maison au toit de paille.

La maison au toit de paille

La maison au toit de paille
Cette petite maison jaune a été en fait le premier bâtiment construit sur la propriété et dans lequel la famille royale s'installa durant les travaux au Palais. Elle devait à l'origine être détruite une fois le Palais construit. Cependant, la Reine Marie demanda à son époux de l'autoriser à faire de cette maison son atelier artistique, car elle aimait s'adonner aux joies de la création artistique. Plus tard, cette maison servit également comme école pour les trois Princes.

Un peu plus loin, se dressent les cuisines du Palais, séparées de ce dernier pour que les odeurs ne dérangent pas les habitants du Palais ou ses invités. Elles sont reliées au Palais par un tunel d'une longueur de 90 mètres, par lequel les plats étaient acheminés dans la salle à manger royale.

Les cuisines du Palais
La construction du Palais Royal fut achevée en 1929. Il a une superficie de 4000 m2 et est couvert de marbre blanc. Décoré dans un style Serbo-Byzantin, il est à mon avis beaucoup plus frappant que le Palais Blanc.

Le Palais Royal

Le Palais Royal

Le Palais Royal

Le Palais Royal

Le Palais Royal

Le Palais Royal

Le Palais Royal

Le Palais Royal
Depuis l'entrée du Palais, nous avons pu admirer le parc en style anglais avec son pavillon le Belvédère. La piscine qui se trouve devant le pavillon (et qui était malheureusement vide lors de notre visite) sert non pas à se baigner mais à ce que le pavillon se reflête sur l'eau, dans une symétrie impeccable.

Le parc à l'anglaise et le Pavillon Belvédère
Nous entrons alors dans le palais dans lequel se succèdent les salons. Le salon bleu, qui porte ce nom à cause du tapis bleu provenant de France en 1929, est meublé en style baroque français. Le plafon du salon en style Renaissance italienne est en or 24 karats. Le salon dit les cadeaux nuptiaux abrite les dons faits lors du mariage du Roi Aleksandar I et de la Princesse Marie de Roumanie, le 8 Juin 1922: oeuvres d'art célèbres et surtout deux grands coffres richement décorés, dons du dernier Roi d'Italie, Philippe Emmanuel de Savoie, qui contenaient l'apparat de mariage des futurs mariés.

Il donne vue sur une cour à la colonnade de style Byzantin antique où sont éxposées quelques oeuvres d'art (mais aussi le barbecue du Prince Aleksandar II).

La cour antique

La cour antique

La cour antique
Dans ce salon se trouvent également deux colonnes en onyx blanc dont l'une cache une anecdote intéressante. Lors de la libération de Belgrade par l'Armée rouge, un partisan porté par son enthousiasme grava une étoile dans l'une des colonnes, puis voyant qu'elle n'avait pas beaucoup d'effet, décida de la peindre en rouge. Au fil des années, la couleur rouge disparut petit à petit sous les couches d'onyx, mais malgré les tentatives pour faire disparaître l'étoile, sa trace, à présent noire, est encore visible, comme un fantôme du passé.

Mais c'est dans les locaux souterrains que nous nous sommes retenus le plus longtemps. On descend les escaliers et on se retrouve dans un autre univers, dans l'espace conçu pour les soirées entre amis proches: celui de la Salle Magique. Les deux artistes russes engagés à la décoration de cet espace se sont inspirés de la partie la plus ancienne du Krémlin où est enterré Ivan le Terrible et ont reproduit sur les murs de la Salle Magique leur vision à la russe du conte arabe des Mille et Une Nuits.

Sur une commode, une sculpture noire, créée par la Reine Marie porte le nom du ''Chevalier en contemplation''. Il porte un long plastre qui le recouvre entièrement et sa tête est penchée dans la méditation et la douleur, comme celle qu'a ressentie la Reine à la mort de son époux à Marseille.

Dans le Salon des Murmures se trouve la réplique de la fontaine du palais à Saint Pétersbourg. Sur le mur, une serrure et une clé. Lorsque l'on tourne la clé dans la serrure, l'eau commence à couler et le bruit qu'elle émet forme pratiquement une barrière sonore, si bien que le Roi pouvait s'entretenir en toute discrétion avec ses interlocuteurs, sans peur que quelqu'un à l'extérieur de la salle puisse entendre un seul mot de leur conversation.

La salle qui servait à la dégustation du vin est aujourd'hui transformée en salle de billard.

La salle de cinéma est également un témoin précieux du prestige d'antan car c'était la première salle de projection cinématographique dans le Royaume. C'est dans cette salle que le Maréchal Tito aimait regarder ses westerns favoris, surtout ceux dans lesquels John Wayne avait le rôle principal. Une petite curiosité: 6 fauteuils sont installés dans une rangée et c'est là que prenaient place les représentants des 6 républiques de la République Fédérative Socialiste de Yougoslavie. Le fauteuil du Maréchal Tito était élevé sur une petite estrade, à l'arrière des 6 fauteuils. Il faut souligner que les 6 fauteuils étaient littéralement bourrés de microphones, si bien que le Maréchal pouvait, dans leur dos, écouter tout ce que ses ''amis'' avaient à dire, dans les moments de détente où leur attention baissait un peu.

En sortant du Palais Royal, nous nous dirigeons vers le dernier bâtiment à visiter: la petite chapelle dédiée à Saint André, qui est le Saint Patron de la famille royale. Les icônes et fresques sur les murs sont les répliques des icônes et fresques de tous les plus grands monastères serbes,

La chapelle du Palais Royal

Entrée de la chapelle

Cour à l'arrière de la chapelle

La chapelle



Là aussi, les Partisans ont laissé leurs traces à la libération de Belgrade en 1944: le Christ dont le visage couvre tout le dôme de la chapelle porte un trou de balle entre les yeux.

A la sortie la chapelle, le canon de Karađorđe, héro de la lutte contre l'occupation ottomane et fondateur de la ligne royale des Karađorđević,

Le canon de Karađorđe
Une très belle visite qui rappelle que la Serbie faisait autrefois partie de l'élite, avec une dynastie liée aux grandes familles royales européennes. Que de tourments depuis!