lundi 23 février 2015

Le Comité olympique de la Serbie a faîté ses 105 ans

23 février 2015, 

Aujourd'hui, en me promenant dans le centre ville par un beau temps ensoleillé qui, j'espère, annonce le printemps, j'ai eu le plaisir inattendu d'assister à la cérémonie du 105ème anniversaire de la création du Comité Olympique de la Serbie.

Devant le célèbre hôtel Moskva, sur la façade duquel a été inaugurée une plaque marquant cet événement, étaient présents, entre autre, le Ministre de la Jeunesse et du Sport Vanja Udovičić, ancien membre de l'équipe de waterpolo de Serbie aux multiples médailles, et à ses côtés, le célèbre basketteur Vlade Divac, Président du Comité Olympique de la Serbie. Le drapeau serbe, aux sons de l'hymne nationale, a été élevé par les membres de l'équipe nationale de basket à 3 joueurs qui est la tenante du titre de champion du monde.

L'hôtel Moskva

L'équipe de Serbie de basket à 3 joueurs
Le drapeau serbe

Le Ministre de la Jeunesse et du Sport Vanja Udovičić et le Président du Comité Olympique de la Serbie, Vlade Divac

Vlade Divac porte la couronne de laurier
Mais pourquoi cette cérémonie a-t-elle eu lieu devant l'hôtel Moskva. Et bien, le 23 Février 1910, au 4ème étage de l'hôtel, a été officiellement formé le "Club Olympique Serbe", et ceci à l'initiative de quelques jeunes officiers qui avaient fait leurs études en France (et oui, la bonne vieille amitié franco-serbe). Depuis, cette organisation a changé bien des fois de nom, autant de fois que le pays. Et ce n'est qu'en 2006, après l'indépendance du Monténégro, qu'elle devient à nouveau le Comité Olympique de la Serbie.

Les fondateurs du Club Olympique de la Serbie en 1910
Le Royaume de la Serbie prit part pour la première fois aux jeux olympiques en 1912, à Stockholm. Sans aucun doute, le sportif serbe le plus remarqué fut le jeune Dragutin Tomašević, soldat dans le 18ème régiment d'infanterie, dont la courte vie et le destin tragique sont presque hollywoodiens. 

Dragutin faisait déjà sensation en Serbie en courant aux côtés des trains et en arrivant à destination avant eux. Durant les jeux olympiques, ils eut bien des déboires.

D'abord, une blessure l'empêcha de courir les 10 kilomètres. Puis, il tomba amoureux d'uné suédoise qui lui fit littéralement perdre la tête (ah, ces suédoises!) Ses adversaires qui virent en lui une menace plus que réelle tentèrent de l'empoisonner. Heureusement, la serveuse du restaurant l'avertit à temps et lui conseilla de ne rien manger ou boire. Enfin, lors du marathon, ils le firent tomber dans une tranchée au bord de la route dans laquelle il fut retenu le temps nécéssaire pour que les favoris le dépassent. 

Dragutin Tomašević
Il reçut pourtant uné médaille des mains mêmes de Pierre de Coubertin pour sa participation aux jeux. 

Dragutin Tomašević reçoit sa médaille pour sa participation aux jeux
Ami de Đorđe Karađorđević de la dynastie royale, il refusa l'offre de ce dernier de ne pas aller au front au début de la Grande Guerre, en devenant membre du bataillon sportif. Dragutin choisit de se battre et trouva la mort en 1915, en première ligne. 

La légende dit que l'autopsie dévoila que Dragutin avait deux coeurs et que c'était probablement la raison pour laquelle il pouvait courir plus vite que les trains, sans se fatiguer.

Dragutin avait deux coeurs, et les sportifs serbes, depuis, ont certainement un coeur "grand comme çà" pour réussir, dans un si petit pays où les conditions d'entraînement ne sont pas à un niveau enviable, à toutefois remporter des médailles qui inspirent les nouvelles générations.

mardi 17 février 2015

La visite du Parlement de la Serbie

Chaque premier samedi du mois, le Parlement ouvre ses portes aux visiteurs. Enfin, il faut quand même réserver sa place à temps car le groupe de visiteurs ne peut pas dépasser une trentaine de personnes. La visite est gratuite.

Le Parlement
Alors, commençons notre visite. Notre hôte s'appelle Rodoljub Dinić et il est le coordinateur chargé de l'accès du public au Parlement.

Le premier projet arhictectural du Parlement fut réalisé à la fin du XIXème siècle par le célèbre architecte serbe Konstantin Jovanović dont on peut admirer certains projets dans le centre de Belgrade, comme, entre autres,  l'immeuble de la Banque Nationale de Serbie dans la rue du Roi Pierre ou encore l'immeuble de Nikola Spasić dans la rue du Prince Michel. Cependant, son projet pour l'immeuble du Parlement fut trop ambitieux pour l'époque et ne fut donc pas réalisé par manque de moyens financiers.

Projet initial du Parlement par l'architecte Konstantin Jovanović
En 1901, à la suite du concours officiel lancé pour le projet architectural du Parlement, c'est le projet de l'architecte Jovan Ilić, diplômé de l'Université de Vienne, qui fut choisi. Cependant, les travaux ne furent pas entrepris et, en 1907, lors du deuxième concours, c'est à nouveau le projet de Jovan Ilić qui fut élu.

Cette fois, la pierre angulaire fut déposée par le Roi Pierre 1er, au mois d'aôut de la même année. La cérémonie qui marqua le début de la construction du Parlement est restée dans les annales historiques de Belgrade et on peut en trouver la description précise dans le numéro du journal Politika. Ce jour précis était également l'anniversaire de l'héritier du trône Aleksandar. La grandiose entreprise architecturale fut d'abord bénie dans l'église Saborna Crkva, puis le cortège se rendit jusqu'au chantier.

Le Parlement fut achevé en 1936, soit 29 ans après la cérémonie du début des travaux. Il faut dire qu'il y a bien des raisons pour cela. D'abord les guerres des Balkans (1912-1913), puis la première guerre mondiale qui décima littéralement la population serbe et dont la Serbie eut beaucoup de mal à se remettre. En 1917, l'architecte Jovan Ilić quitta ce monde. En 1918, le Royaume de Serbie devint le Royaume des Serbes, Croates et Slovènes, mais déjà en 1929, il devint le Royaume de Yougoslavie. Enfin, comme l'avait prévu, selon la légende, une célèbre diseuse de bonne aventure, le Roi Aleksandar Karađorđević, à qui elle prédit qu'il ne verrait pas la fin des travaux au Parlement, trouva la mort lors de l'attentat de Marseille.

L'atentat de Marseille
Bref, en 1934, à la mort du Roi Aleksandar, la construction du Parlement n'en était pratiquement arrivée qu'au niveau du sol. Les plans furent confiés au grand architecte russe de la cour de l'empereur Nikola II qui avait fui la Révolution bolchévique, Nikolaj Krasnov.

L'architecte russe Nikolaj Krasnov
Il érigea l'immeuble du Parlement en respectant tous les moindres détails des plans originaux, en hommage à son prédécesseur. Cependant, c'est lui qui fit le choix des matériaux et des couleurs pour la décoration intérieure du bâtiment.

Enfin, en 1936, la première cession du Parlement du Royaume de la Yougoslavie eut lieu dans ce magnifique bâtiment qui, depuis ce jour, servit toujours en tant que Parlement, à l'exception des années de l'occupation allemande durant lesquelles s'y trouvèrent les bureaux de la Commande Nazi.

En 2007, soit, symboliquement un siècle après le début des travaux, après plusieurs dénominations du pays, et après la sécession du Monténégro, le Parlement dont la construction avait été entamée du temps du Royaume de la Serbie devient enfin le Parlement de la Serbie.

Le Parlement sous la neige

La façade arrière du Parlement


L'entrée du Parlement
Le vestibule néoclassique du Parlement est monumental. La coupole est de style Renaissance. Le blason de la République Fédérative Socialiste de Yougoslavie y est sculpté. Le bâtiment étant placé sous protection de l'État, il est interdit d'y changer quoi que ce soit. Cependant, il faut savoir que sous le blason de la RFSY, se trouve également le blason du Royaume de Serbie, recouvert par le régime communiste à la fin de la deuxième guerre mondiale, et qui donc reste caché à tout jamais.

La coupole et le blason de la République Fédérative Socialiste de Yougoslavie
Dans le vestibule se trouvent également quatre statues colossales datant de 1937 et 1938 qui offrent une rétrospective de l'Histoire du temps de Royaume des Serbes, Croates et Slovènes.

À l'entrée se trouve la statue du Prince Slovène Kocelj (Kotseli, seconde moitié du IXème siècle).

Le Prince slovène Kocelj
La Serbie est représentée par deux statues: d'abord celle de Karađorđe, héro qui organisa la première insurgion contre l'occupation Turque, en 1804, et qui est également à l'origine de la ligne royale Karađorđević. Ainsi, un hommage est rendu à la famille Karađorđević dont faisait partie le Roi Pierre 1er qui déposa la pierre angulaire du Parlement.

La statue de Karađorđe
Puis se dresse la statue de l'Empereur Dušan (XIII ème siècle), conquérant, mais aussi bienfaiteur qui prit soin de son peuple et issut le premier acte juridique en Serbie, connu sous le nom de "Code de Dušan".

L'empereur Dušan montrant fièrement son code
Enfin, les Croates sont représentés par la statue du Roi Tomislav (Xème siècle).

La statue de Roi Tomislav de Croatie
Dans le vestibule se trouve également une plaque en bronze datant de 1981 et marquant le 20ème anniversaire de la première conférence des pays non alignés qui avait eu lieu à Belgrade en 1961, du temps du légendaire Tito.


À l'opposé de cette plaque, se trouve le buste de Nikola Pašić, homme politique de la fin du XIXème et début du XXème siècle, plusieurs fois premier ministre et fondateur du Parti radical populaire. Son buste se trouve à l'entrée du Parlement, car le Parlement se trouve au numéro 3 de la Place qui porte son nom, la Place Nikola Pašić.


La petite salle du Parlement est notre escale suivante. Rénovée en 1960, elle avait jusque-là ressemblé davantage à une église qu'à une salle officielle parlementaire.

Le podium de la petite salle du Parlement et notre hôte
Sur le mur, derrière le podium, se trouve une fresque grandiose datant de 1937, représentant une allégorie de toutes les valeurs de la société: la maternité, l'éducation, l'élevage, l'agriculture, l'industrie...

La fresque glorifie également la tolérance religieuse. En effet, en haut à gauche se trouve une église orthodoxe, puis vers la droite, un monastère catholique et, en haut à droite, une mosquée.

La fresque dans la petite salle du Parlement
Entre les voûtes de la galerie, 12 fresques: 6 hommes et 6 femmes en costumes nationaux, chaque couple représentant l'une des républiques de l'ex République Fédérative Socialiste de Yougoslavie: la Serbie, la Croatie, la Slovénie, la Bosnie-Hertsegovine, la Macédoine  et le Monténégro.



Dans les couloirs, les portraits des Présidents successifs de l'Assemblée.



Nous arrivons ensuite dans la grande salle du Parlement, là où se mènent les discussions parfois orageuses entre parlementaires. La salle est incroyabement plus petite qu'on ne le penserait en regardant les sessions à la télévision.

En 2009, le podium fut reconstruit et retrouva son aspect d'autrefois d'après les plans et dessins originaux. Les places centrales sont occupées par le Président de l'Assemblée, le Secrétaire Général et les Vice-présidents.

Le podium de la grande salle du Parlement

Les places centrales
Sur un pupitre sous verre, se trouve la reproduction de la première Constitution serbe dont l'original se trouve dans les Archives de la Serbie.

Reproduction de la première Constitution de la Serbie
La galerie compte quelques 200 places et elle est ouverte au public qui désire assister et prendre part aux discussions parlementaires.

La galerie
Nous arrivons ensuite au salon diplomatique du Prince Pavle (Paul). À la mort du Roi Aleksandar, assassiné lors de l'atentat de Marseille, le Prince Pavle devint le Prince-Vicaire du Royaume de la Yougoslavie. Il était le neveu du Roi Pierre 1er.

Grand amateur d'art, il était un collectionneur assidu. Son salon est meublé en style Louis XIV et Louis XV.





C'est dans ce salon que le Président de l'Assemblée reçoit les hommes d'État en visite à Belgrade. Le drapeau de la Serbie et le drapeau du pays du visiteur distingué y sont exposés. C'est pourquoi, dans l'entrepôt du Parlement, se trouve les drapeaux de presque tous les pays du monde.


Les portraits des rois serbes décorent le salon. Cependant, ces oeuvres d'art n'appartiennent pas au Parlement. Elles ont été prêtées par le Musée National qui est en reconstruction.

Le Roi Aleksandar Obrenović

Le Roi Milan Obrenović

Le héro  Karađorđe

Le Prince Aleksandar Karađorđević

Le Roi Aleksandar Karađorđević

Le Prince Miloš Obrenović
Dans ce salon sont également exposés quelques cadeaux offerts par les hommes d'État en visite au Parlement: des vases en cristal de Tchécoslovaquie, de Turquie, une trompette militaire suédoise, et une pendule en or de marque Zénith qui, étrange pour une montre suisse, ne marche pas!



La bibliothèque du Parlement est bien entendu de type fermé. Cependant, les citoyens qui ont besoin de faire des recherches dans les livres et documents qui s'y trouvent, peuvent envoyer une requête qui leur sera certainement approuvée.

La bibliothèque abrite quelques 60.000 livres. 100 livres sont des exemplaires rares, comme un livre imprimé à Venise il y a environ 250 ans. La bibliothèque garde également les compte-rendus des sessions de l'Assemblée, écrits à la main dans la langue serbe d'antan. Comme on tient compte aujourd'hui des dépenses en essence pour les déplacements, à l'époque on notait les dépenses pour l'avoine des chevaux.





Le hall central du Parlement est la salle où sont reçus les visiteurs en visite officielle au Parlement, où les parlementaires donnent leurs déclarations pour les communiqués de presse. Du temps du Royaume de la Yougoslavie, elle servait également de salle de bals, tradition qui n'éxiste plus, mais toutefois, 3 ou 4 fois par an y sont organisés des cocktails.






Nous voici de nouveau dans le vestibule et c'est la fin de notre visite. À la sortie, il est impossible de ne pas admirer les deux magnifiques statues en bronze, au pied de l'escalier montant jusqu'au porche du bâtiment. Elles sont l'oeuvre du sculpteur Toma Rosandić, datent de 1937-1938 et la composition s'appelle "S'amusaient les chevaux noirs" ("Igrali se konji vrani"). Il ne faut pas manquer non plus le détail sur les deux mâts situés sur le parvis: le blason de la Serbie avec son aigle à deux têtes et les quatre "S" symboliques portant le message que les Serbes doivent s'unir et s'entendre pour persister, résister et surmonter tous les obstacles.